Les États-Unis sont en passe d’élire un homme de couleur à la Maison-Blanche. Tout au moins si on en croit les sondages. A l’instar du JDD, la presse semble unanime pour dire que le peu de temps qui reste à McCain pour refaire son retard semble insuffisant pour y parvenir. Mais rien n’est sûr car ce pays est le champion des surprises, quand on sait que par le passé, des révélations de dernière minute sur l’un ou l’autre des candidats peuvent faire capoter bien des espoirs.
Il y a aussi la loi électorale américaine qui n’a rien à voir avec ce que nous connaissons. Des inscriptions en masse sur les listes électorales peuvent compromettre une machine à gagner bien huilée. Il y a aussi le fait qu’Obama est un homme de couleur et qu’en conséquence il est à supposer que nombre d’électeurs racistes de son parti répugneront à voter pour lui.
Mais partons de l’hypothèse que la victoire revienne à Barack Obama puisque le sujet de cet article en découle. Comme il n’a échappé à personne qu’il est noir, la problématique raciste va avoir une énorme importance. Racisme dans les deux sens quand on sait que 90 % des Noirs américains voteront pour lui et, dans ce pourcentage, nombreux seront ceux qui voteront pour lui uniquement parce qu’il est Noir et non forcément pour ses qualités.
Racisme anti-Noir aussi, bien entendu, bien des membres blancs du parti rechigneront à voter pour leur candidat noir.Et nous ne reviendrons pas sur l’apartheid, les émeutes, les tueries, le Ku Klux Klan et ses atrocités, l’extermination des Indiens... la liste est longue. Martin Luther King y a laissé sa peau, ainsi d’ailleurs que J. F. Kennedy. Et pourtant, même si tout n’est pas résolu, atteindre un tel résultat paraît prodigieux, sachant d’où ils sont partis.
Mais ce qui est remarquable, c’est le peu de temps qui s’est écoulé entre la fin de l’apartheid (qui n’est pas la fin du racisme), et l’éventualité de l’élection d’un président de couleur et l’acceptation de cette idée par une majorité des Américains d’une part, mais aussi de celles de la plupart des pays occidentaux.
De la à imaginer que cela peut faire naître des vocations à nombre de politiciens de couleur dans un pays comme la France...
Interrogés sur les intentions probables, il semble que les Français se sont prononcés massivement de façon positive en faveur de l’élection d’un candidat à la peau noire.à gauche sans problème, mais aussi 73 % des sympathisants UMP.
Il était cependant à prévoir que les pourcentages tombent de façon conséquente si le candidat était asiatique, et encore plus d’origine maghrébine.
Mais la France est-elle prête pour cela ? Et l’Europe ?
J’ai voulu faire un tour sur le net pour prendre la température. Les avis semblent partagés, c’est le moins qu’on puisse dire. Sont-ils sincères, ces gens qui répondent oui au sondage, ce qui pourrait être politiquement correct et tout à fait « dans le vent » par rapport aux Etats-Unis ? Mais combien pensent « non » par atavisme ?
Dans les communautés, la question première est : musulman ou chrétien ? La question est d’importance. Même si le personnel politique, notamment au gouvernement s’est considérablement diversifié dans ce domaine (et c’est nouveau), les réticences sont loin d’être abolies. Trop tôt, entend-on çà et là, ou du moins pas avant plusieurs décennies. Trop tôt, mais pas impossible !
En tout cas pas pour 2012 ! Mais pourquoi ? « Cherchez pas à comprendre, m’a dit un ami, c’est comme ça. La France n’est pas l’Amérique, les Français ne sont pas racistes, mais attachés à leur « béret-baguette » ? Et au fond d’eux-mêmes… ». Cela peut-il tout résumer ?
En France, un seul député a la peau noire : Christiane Taubira. Et plus de 60 % des gens de couleur estiment avoir subi dans l’année au moins une situation de discrimination. Elle pense qu’il y a certes du racisme, mais que les Français pourraient être prêts pour un tel changement. Rama Yade le pense aussi, mais estime que la difficulté viendrait plutôt du système politique.
Le plus curieux c’est de lire les commentaires des lecteurs de la presse dont nombre d’entre eux mettent en avant l’élection de Nicolas Sarkozy comme un premier pas dans ce sens. Il est pourtant bien blanc et français à part entière. Mais c’est compter sans l’esprit de clocher fermement ancré semble-t-il, et ce qui vient d’ailleurs, té, il vient d’ailleurs, comme dirait Maurice Pagnol ! Combien faut-il de générations de souche pour être vraiment français ?
Ou bien n’est-ce pas de l’hypocrisie qui fait dire oui quand on pense non ? Un racisme inavoué et inavouable, en quelque sorte ?
Alors, plutôt que de disserter longuement sur les aspects de ce sujet qui n’a pas fini de faire couler beaucoup d’encre, voyons au fond d’eux-mêmes, ce qu’en pensent les usagers d’Agoravox et quels sont les arguments qui seront mis en avant ? C’est ce que j’ai voulu savoir. Mais pour que les choses soient claires et, très sincèrement, pour ce qui me concerne, je pense comme notre regretté Claude Nougaro :
« Au-delà de nos oripeaux
Noir et Blanc sont ressemblants
Comme deux gouttes d’eau. »
Sampiero, AGORAVOX
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